Interview : Julien Pion, coordinateur de Supermab

19.04.2020

En 2017, les réseaux bretons ApresMai, Collectif des festivals, Bretagne(s) World Sounds et la Maison des producteurs identifient ensemble le besoin d’avoir un espace au sein duquel les acteur·trices des musiques actuelles de la région apprendraient à mieux se connaître, à s’entraider et à s’adresser en commun aux pouvoirs publics. Supermab, espace de coopération pour les musiques actuelles en Bretagne est né !

Après deux ans d’étude et de réflexion en groupes de travail, un espace de coopération pour les musiques actuelles en Bretagne se structure sous le nom de Supermab, autour des objectifs suivants :

  • développer l’interconnaissance
  • accompagner et participer à la structuration des acteur.trice.s des musiques actuelles
  • être un espace de veille, de réflexion et d’action sur les mutations des musiques actuelles
  • être un interlocuteur incontournable et représenter la diversité des visages des musiques actuelles en Bretagne

Il a vocation à accueillir toute personne investie dans musiques actuelles en Bretagne : bénévoles ou professionnel.les, artistes ou technicien.ne.s, spectacle vivant, musiques enregistrées, enseignement de la musique, lieux, festivals, institutions, médias, prestataires, disquaires, labels…

Que peut apporter Supermab par rapport aux autres fédérations et représentants régionaux ?

La structuration des musiques actuelles en Bretagne s’est faite ces dernières années par l’intermédiaire de réseaux professionnels et thématiques (AprèsMai pour les lieux, La Maison des producteurs pour les producteurs et développeurs…). En parallèle, chacun.e dispose de son propre réseau informel et d’affinités en fonction de l’esthétique défendue, de l’activité ou du territoire. Pour compléter ce tableau, les lieux labellisés, les syndicats ou certaines institutions ont pour rôle de favoriser les connexions entre acteur.trice.s.

L’espace de coopération propose un périmètre large et s’adresse aux professionnel.le.s comme aux amateur.trice.s mais surtout à celles et ceux qui ne bénéficient pas aujourd’hui de cette mise en réseaux. Ce projet a été lancé dans une démarche d’intérêt général et dans le but de refléter la diversité des musiques actuelles et valoriser la grande richesse qui en découle. Chacun.e y a donc sa place pour construire ce projet commun tout en lui permettant de préserver sa singularité.

L’incertitude de la crise sanitaire donne-t-elle un nouveau sens à la création de ce collectif ?

Le besoin de réfléchir et d’agir ensemble est fort, d’autant plus aujourd’hui. Notre voix porte aussi davantage quand nous sommes uni.e.s. Nous pensions mi-mars que beaucoup de choses seraient remises en question dans notre construction ; en fait, notre utilité a plutôt été largement confirmée. Nous avons organisé des rencontres en visio et adressé des constats et des préconisations en direction des collectivités. Nous avons également partagé des informations afin que chacun.e y voit, autant que faire se peut, un peu plus clair dans le brouillard juridique, administratif et sanitaire qui aujourd’hui est loin d’être levé.

Nous sommes également la dernière région de France qui ne dispose pas de ce type d’outil régional. Nous avons ainsi pu échanger avec nos homologues des autres régions et confronter nos situations. Il est ainsi possible par le biais de l’espace de coopération de faire remonter des choses au niveau national et de participer à certaines réflexions qui enrichissent notre propos et nous permettent de mieux aider et informer les acteur.trice.s sur le terrain.

Qu’est-ce que la crise sanitaire a révélé du point de vue de cette nouvelle structure ?

Que nous sommes dans la même galère quelle que soit notre activité. Elle révèle aussi l’isolement important que beaucoup d’acteur·trices vivent. Loin des réseaux et des projets de coopération comme le nôtre, on peut très vite être coupé du monde et des circuits d’informations qui nous permettent d’avancer.

Cette crise a aussi confirmé, comme ce fut le cas pour le monde hospitalier, les urgences et les besoins d’hier : la grande précarité des intermittent.e.s, la nécessité sociétale et humaine (économique aussi) de l’activité culturelle et en particulier musicale, l’importance de venir en aide aux petits lieux, aux festivals, aux bureaux de production et au tissu associatif local pour maintenir le dynamisme des territoires. Celles et ceux qui sont les plus touché.e.s sont aussi les moins subventionné.e.s : disquaires, cafés, magasins d’instruments, prestataires…

La dimension humaine est aussi importante. A un moment donné, juste demander « comment ça va ? » et permettre à chacun de parler de sa réalité peut faire du bien et aide à rebondir.